Mathieu Favresse s'intéresse passionnément à ce petit pays qui connut l'excellence, qui rayonna dans le monde entier, et engendra de grands artistes, poètes, peintres, musiciens, architectes. Il se replonge avec délice dans ce grand moment de la fin du 19e et du début du 20e siècle que traversa la Belgique, et nous en fait revivre l'esprit. Le pays des "Magritte du cinéma" et des "films culte" réclame-t-il ses clichés, ses "images-choc". Veut-il des "icônes" ? Qu'à cela ne tienne, il en fera : James Ensor, Rik Wouters en mixed média, technicolor, et 3D post-post-impressionniste. Mais aussi Horta en buste, grave et admirable, Hergé pris sur le vif, saisissant, et le père de Gaston Lagaffe, rêveur et délicieux. C'est avec humour et tendresse, mais avec force que Mathieu Favresse convoque toute la ménagerie identitaire d'un pays en mal de lui-même, pour en réveiller les sens et le secouer. Ses lions sont les cousins de ceux qui ornaient nos monuments fondateurs, rarement observés ailleurs que dans un cirque. Et pour être certain qu'on se demande s'il est sérieux, à côté de ses dessins où il reconstitue les grands moments des Expositions universelles ou les performances techniques de ce pays d'ingénieurs, il nous fera aussi des chiens ou des chevaux, pour être sûr qu'on ne le prenne pas pour un minimaliste conceptuel et qu'on le soupçonne un peu d'être pompier. J'aime les artistes qui sèment le doute et nous sortent du confort esthétique.
Pierre Loze - septembre 2019