Julia conjugue, comme souvent dans les créations de la metteuse en
scène et réalisatrice brésilienne, les moyens du théâtre et du cinéma.
Mademoiselle Julie, aristocrate de la fin du XIXe siècle (chez
Strindberg), est ici plongée dans les quartiers chics de Rio de Janeiro
où, jeune femme riche, elle s'éprend du chauffeur noir de ses parents.
Guerre des classes, affrontement amoureux et conditionnement social du
désir sont évoqués dans cette fabrique de l'image sur écrans géants où
la vidéo nous rapproche encore de l'intime.
Des rapports de domination du Brésil d'aujourd'hui aux relations
maître-esclave, érotisées par un dispositif scénique inventif,
Christiane Jatahy livre une version brûlante (où le sexe est donné à
voir comme véritable enjeu de pouvoir) d'une pièce jugée sulfureuse en
son temps. Et quand, à la fin de la représentation, Julia Bernat
(actrice fétiche de Christiane Jatahy) sort soudain de son rôle pour
faire part de sa difficulté à l'incarner, un ange passe, la question de
l'ici et maintenant se pose… Puis, la pièce reprend et va vers sa fin,
inéluctable.