Les mélomanes bruxellois, les curieux, les arpenteurs de chemins de
traverses, les mutins qui tirent dans les coins, les piliers de
concerts, connaissent souvent le label Okraïna, lancé par Philippe
Delvosalle depuis une bonne dizaine d’années. Ils ont aussi croisé, ou
entendu celui-ci alors qu’il programmait à la Cinematek, co-programmait
le P’tit Faystival, organisait des concerts au Nova (Daniel Johnston !)
ou ailleurs, de Louvain-La-Neuve à Bruxelles, co-animait MU sur Radio
Campus et mille autres choses. Depuis peu, il propose un label cousin
d’Okraïna, By The Bluest of Seas (deux titres de films de Boris Barnet)
avec Beata Szparagowska qui met en images, à travers pochettes et
inserts, le travail des musiciens. Il s’agit essentiellement de musique
improvisée, inclassable, évocatrice, sans paroles. C’est dans cet
univers que nous vous invitons à vous plonger lors de cette soirée.
L’Art s’est souvent posé la question de savoir s’il pouvait retenir le Temps,
le fixer, lui donner un sens. La Modernité découvrit dans la Mise en
Abyme une modalité de son expression, tandis que pour certains, c’était
la pratique en elle-même de l’Art qui tente de toucher du doigt ce
Graal. On pourrait tout à fait voir dans la démarche de Christophe
Delbecq une approche documentaire de ces deux gestes artistiques. Il
filme régulièrement Dirk Wauters, batteur, sculpteur et percussionniste,
qui chaque jour depuis des lustres, dessine, se photographie, écrit et
enregistre une improvisation musicale avant de tout archiver
méticuleusement. Avec sa grande barbe, il tient autant du peintre
flamand primitif peignant ses Vanités, que de l’artiste contemporain
conceptuel. Le film apporte une dimension de plus à cette spirale de
mise en abyme, que la présentation couplée au concert de Dry Speed dans
lequel joue Dirk Wauters va encore accentuer.
→ La projection sera suivie d’une rencontre avec Christophe Delbecq,
Dry
Speed est un trio à la musique organique improvisée, composé de Joachim
Devillé (trompette, guitare, effets), Thomas Olbrechts (sax alto,
instruments préparés) et Dirk Wauters (batterie, percussions). Ensemble,
les musiciens proposent un moment d’improvisations aux confins d’une
tradition du free jazz européen, et un ancrage dans une approche du son
spécifique à nos régions. Une musique intense et subtile qui hante ce
naissant label de musique, le film de Christophe Delbecq et qui peut
parfaitement faire vibrer la salle du Nova.