C’est avec une grande joie que nous renouvelons une session Filmlabs de printemps avec nos compères des Pays-Bas et leur labo Filmwerkplaats, qui accueille l’expérimentation à bras ouvert et revendique la culture DIY comme moteur de création du cinéma argentique. Il siège au sein de l’organisation Worm, lieu culte de diffusion de culture alternative à Rotterdam. Filmwerkplaats est un labo pilier du réseau international filmlabs, avec trois pièces humides pour développer la pellicule, plusieurs machines recyclées de l’industrie, trucas, développeuse etc., ainsi qu’un savoir situé sur plusieurs décennies. Il offre aux artistes des outils remarquables pour explorer tout le potentiel de ce média tactile et performatif. Esther Urlus, fondatrice du labo, y donne régulièrement des workshops de fabrication maison d’émulsion, ou couche sensible qui capture la lumière sur le film. Nous aurons l’honneur de sa présence pour nous présenter une série de courts métrages réalisés par différents artistes.
HANDMADE
HANNE VAN ASTEN, 2004, NL, 16MM, 6'
Un film tourné avec un Sciopticon. La lanterne magique du 19e siècle est équipée de filtres de couleur et d’un mécanisme de fondu enchaîné. Filmer, c’est capter la lumière. Images, contours, formes. Tout est lumière, seule la lumière vit.
FRANCIEN VAN EVERDINGEN, 2004, NL, 16MM, 6'
Le protagoniste de ce court métrage ne se préoccupe pas du monde extérieur. Elle reste enfermée chez elle et se prélasse dans sa routine quotidienne. Elle arrose les plantes, se fait un sandwich, se verse une tasse de thé, et à nouveau arrose les plantes, se refait un sandwich... L’amaryllis est magnifique cette année, mais elle pâlit devant le paysage qui se déroule en arrière-plan : le papier peint se décolle et se pare de couleurs vives. D’étranges motifs se bousculent dans leur appétit d’attention et leur soif de gloire. Ils titillent cette femme d’intérieur diligente, virevoltent autour d’elle comme des feux-follets pour l’inciter au désordre...
Ce film a été réalisé à l’aide de multiples techniques d’éclairage, d’animation et de "travelling matte printing". La musique est écrite et interprétée par Kamiel Tolenaars.
NAN WANG, 2023, NL, 16MM, 6'
Oscillation in Sight est une série d’expériences cinématographiques qui résistent à l’idée de représenter et de reconstruire l’apparence du mouvement dans le monde réel. En fabriquant sa propre caméra 16 mm, le cinéaste peut capturer des images sans restrictions telles que le format de l’image, le cadre, la vitesse et l’obturateur. Dans Oscillation in Sight #1, nous regardons un morceau de plastique transparent déformé au moyen d’un micro-moteur rotatif, oscillant entre des visions familières et déformées.
RALUCA CROITORU AND ELENA BUTICĂ, 2024, NL, 16MM, 5'
Filmé en 16 mm, Fioritura est un répit intérieur dans le quotidien. Les protagonistes naviguent entre émotions bouillonnantes et contradictions internes ; ils utilisent le dégoût et le toucher pour passer du superficiel au profond. Les tripes et la ville réclament leur attention. Tandis que les mains balayées rêvent de manucure, les messages attachés aux sachets de tisane deviennent des prophéties instantanées.
Fioritura a été filmé en 16 mm et développé en DIY au Filmwerkplaats, WORM Rotterdam.
LICHUN TSENG, 2024, NL, 16MM, 10'
La création d’une image cinématographique découle du processus d’exposition - un passage, un moment de rencontre avec la lumière. Je produit une image latente formée sur le film à l’aide d’un révélateur "écologique" fait maison. En observant la "nature de la nature", je veux me connecter à la nature en écoutant et en enregistrant les sons au lever et au coucher du soleil. À la nouvelle lune et à la pleine lune, je crée une émulsion sensible à la lumière et l’applique sur des bandes de film 16 mm, transformant la nature sauvage, sans pollution lumineuse, en une chambre noire en plein air.
Chaque étape du processus devient un élément de réflexion et de possibilité créative.
ESTHER URLUS, 2013, NL, 16MM, 7'
L’émulsion handmade est la métaphore fragile de l’"héroïsme" de Konrad et de son cheval Kurfurst aux Jeux olympiques de Berlin, en 1936. En tombant de cheval, il est devenu un héros national, avant de se transformé, rattrapé par l’histoire, en un anti-héros. Réalisé à partir des expérimentations techniques des premières publications cinématographiques et photographiques.
MEMBERS OF FILMWERKPLAATS ASSOCIATION, 2017, NL, 16MM, 8'
7 films réalisés par des membres de Filmwerkplaats ; chaque film dure 69 secondes, ce qui correspond à une couche de film 16 mm enroulé dans les 15 m de la spirale de la cuve de développement LOMO. La durée de 69 secondes était la seule limite, car chaque film a été créé à partir de perspectives, d’expérimentations et de concepts différents.
ESTHER URLUS, 2017, NL, 16MM, 12'
Dans un nuage immersif de perles de couleur, les contours d’un espace en négatif peuvent être discernés, par suggestion, on soupçonne une image ou un objet absent. L’interprétation dépend de l’imagination du spectateur, instinctivement colorée par l’ambiance "dark" de la bande son de Ji Youn Kang. Réalisé sur film 16 mm avec une émulsion maison, Deletion s’inspire du procédé de coloration autochrome, vieux de plus de 100 ans.
EBB AND FLOW
"Ebb and Flow" s’inspire du I-Ching, le livre du changement, chapitre 42 - Yi (croissance). Yi est un message d’expansion et de plénitude. Il s’agit simplement du renouvellement perpétuel du cycle de la vie, épanouissement, décrépitude et renaissance. Flux et reflux, obscurité et lumière, vie et mort... "Ce qui est" trouve sa source dans "ce qui n’est pas". Lichun et Robert utilisent des projecteurs 16 mm et des formes d’ondes analogiques pour créer un voyage immersif qui induit la transe. En superposant, construisant et déconstruisant les textures visuelles et auditives, ils tentent de créer une expérience qui transcende le sens, où le spectateur n’est plus conscient de regarder ou d’écouter. Il se contente d’être.
https://filmwerkplaats.hotglue.me/
https://estherurlus.hotglue.me/
https://worm.org/