« Tout navigue sous de faux pavillons », disait Kafka. Les « personnages » du spectacle sont les premiers à en témoigner… Et à ironiser sur la parfaite adaptation à l’artifice des postures sociales, des jeux de rôles, des normes conformistes qui nous façonnent et nous coulent dans des personnalités d’emprunt. Le temps ne fait rien à l’affaire et toute l’histoire est recyclable dans notre monde des apparences et des vérités formatées.
Le spectacle évoque aussi le sentiment de ne pas être entier dans ses intentions et ses désirs, de ne pas faire corps avec soi, de se sentir constamment divisé, de ne jamais trouver sa place dans le monde… Comment s’en échapper ? Comment jaillir hors du semblant, du faux, de l’emprunté ? Peut-être en se laissant posséder et emporter par la sauvagerie d’une énergie qui libère les « personnages » de ce qui n’est qu’une comédie humaine.
L’histoire du théâtre est friande de la question de l’imposture, du paraître et de l’illusion. Cette question est ancrée dans son ADN, comme dans notre monde. Comme dirait Shakespeare : « Le monde entier est un théâtre. Et tous, hommes et femmes n’y sont que des acteurs. » Avec Histoire de l’imposture créé en 2013, la Cie Mossoux-Bonté interroge cette notion avec malice, baroque et distance humoristique, à travers différents tableaux millimétrés, mêlant jardin d’éden, shooting photos, défilé ou encore music-hall. De postures en attitudes figées, de redémarrages en successions affolées, le tout dégénère en un sabbat carnavalesque où la musique est de plus en plus saccadée, où la fragmentation s’accélère en même temps que se défait l’imposture. Tôt ou tard, les masques tombent.